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Le Cygne Manchot
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Le Cygne Manchot
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13 juillet 2006

Chapitre II

Fouille-merde

2 Septembre - matinée

Bridget Pepper Arvor prenait fébrilement des notes. Ces abrutis de flics s’étaient tirés en laissant un seul agent en faction qui semblait totalement se désintéresser du corps nauséabond. Il regardait sans inspiration particulière le mur couvert de lettres qui avaient bavées sur la brique spongiforme. Il avait des yeux de veau. Encore un crétin de plus sur terre, se dit Bridget.

Le mort, lui, était par contre beaucoup plus intéressant. Et tous les indices laissés encore plus, le flair de journaliste de Bridget Pepper Arvor était le plus fin du canard pour lequel elle bossait.

Ca ne sentait pas bon cette histoire. Surtout que cette impasse n’était pas n’importe quelle impasse. Bien sûr, ce genre d’endroit en regorgeait, toutes plus sales et effrayantes, mais la proximité de certains « commerces » excitait l’imagination de la journaliste et faisait trémousser son chien qui était recouvert d’un manteau du même motif que celui de sa maîtresse. C’est qu’il faisait frisquet des jours-ci. Bridget respira. Ca sentait le grand froid et le bon coup.

Elle griffonnait encore, laissant son esprit s’égarer sur la signification potentielle des indices quand elle entendit une voix basse et monocorde s’adresser à son dos.

     - Tirez-vous de là.

Cette voix, elle la connaissait. A chaque fois qu’elle se rendait, toujours la première, sur des lieux de crimes louches, elle l’entendait qui lui disait invariablement la même chose et rien d’autre. Avec toute sa classe et son chien, elle lui dédiait son plus beau sourire « J’ai ce que je veux, va te faire foutre, inspecteur de mes-deux » et faisait exprès de le frôler en s’en allant pour lui faire sentir l’effluve capiteuse de son coûteux parfum français. Et invariablement, il éternuait et reniflait dans la manche de son pardessus. C’était comme une habitude entre eux. Mais là, Bridget était beaucoup plus intéressée que par les affaires précédentes. Elle se retourna, lui fit un angélique sourire qui en fait voulait dire « Allez, crache moi ce que tu sais » et arrondit sa bouche pour parler.

Mais elle avait en face d’elle un adversaire sacrément coriace. Et hostile. Avant qu’elle ait pu prononcer un mot, il lui réitéra sa demande en termes encore moins polis.

Bridget rétréci ses yeux, prête à lui allonger une gifle retentissante. Mais elle jugea préférable de s’abstenir. Cet inspecteur n’avait pas l’air de se laisser frapper par une bonne femme. Il allait lui en retourner une sans l’ombre d’un remords. Alors elle prit le parti de siffler très peu élégamment son chien, histoire de faire comprendre à ce type que sous vernis il y avait une couche d’intelligence redoutable et de marcher sans foncer droit sur lui.

Le chien ne vient pas. Il s’était vendu à l’inspecteur et se frottait contre lui en quémandant des caresses. A l’étonnement de Bridget, l’inspecteur se pencha et flatta la tête du cabot heureux. En se relevant, il le poussa vers sa maîtresse et reprit sa marche vers son macchabée.


Bridget Pepper Arvor, légèrement troublée de ce geste amical, en tout cas non-inamical, fourra son calepin dans son sac, saisit son chien sous le bras et traça sa route en direction du journal. Elle allait voir en détail qui était cet énergumène. Et fouiller était son métier et surtout son super dada. En moins d’une journée, elle saurait tout sur l’inspecteur Goldwin.

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